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Année C  
1er décembre 2015

Le chemin du Seigneur (Lc 3,1-6)

Lecture du 2e dimanche de l’Avent selon l’approche de la rhétorique sémitique de Roland Meynet

La venue du Christ nous engage sur une route nouvelle et dans un temps nouveau, situés entre sa venue à Noël et son retour glorieux. Préparer le chemin du Seigneur exige une profonde conversion intérieure. Nous sommes en marche et guidé par l’Esprit, engagé avec l’humanité dans une aventure à la fois personnelle et collective. Les obstacles ne manquent pas : montagnes des orgueils, sentiers sinueux des consciences, routes caillouteuses des corruptions et des violences. L’histoire humaine et notre histoire personnelle nous ont appris qu’il est facile de rester sourds à l’évangile.

L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode étant alors au pouvoir en Galilée, son frère Philippe dans le pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias en Abilène, les grands prêtres étant Hanne et Caïphe, la « Parole de Dieu » fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie (3,1-2).

Saint Luc dans l’évangile d’aujourd’hui nous rapporte un évènement historique de portée mondiale. Dans les deux premiers versets, Luc énumère longuement, pour dater le début du ministère de Jean une série de six personnages. Le sacerdoce suprême juif est ainsi mis en parallèle avec le pouvoir païen suprême. Le défilé des personnages conduit par l’empereur a quelque chose de solennel et d’impressionnant qui marque l’importance universelle de ce qui arrive. Les personnages les plus officiels s’y côtoient : païens comme Tibère et Pilate, juifs comme Hérode Antipas et Philippe, fils d’Hérode le Grand gouvernant la terre d’Israël ou des régions païennes. Tous sont pris à témoin d’une affaire qui les concerne tous.

« La Parole de Dieu » fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie (3,2). C’est ainsi que Luc décrit l’intervention divine. Et voici que dans ce cadre on ne peut plus officiel, présenté avec la solennité la plus grande, Dieu intervient. Le contraste entre les plus hautes autorités politiques et même religieuses d’une part et Celui qui gouverne le monde et l’histoire de l’autre ne pouvait pas être marqué de manière plus éclatante. L’opposition est encore renforcée du fait que sa « Parole » ne se manifeste ni à Rome (3,1), centre du monde à l’époque, ni même à Jérusalem, à travers le grand-prêtre (3,2) mais « dans le désert » (3,2) par la bouche d’un inconnu.

Jean parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant un baptême de conversion pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre des oracles d’Isaïe, le prophète : Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droit ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu (3,3-6).

L’inconnu qui parcourt la région du Jourdain est Jean, fils de Zacharie. Jean est juif comme son père Zacharie et leurs noms indiquent que « le Seigneur s’est souvenu » et « le Seigneur a fait miséricorde » ou « s’est penché avec tendresse », comme une mère sur son enfant. Dans cette histoire la signification des noms montre que Dieu est le sujet, l’agent principal sinon unique, de ce qui arrive. C’est lui qui agit, qui mène l’histoire.

« L’avènement » de la parole de Dieu se concrétise en un appel à la conversion (3,3), un retour à Dieu. Le « pardon des péchés » qui est annoncé est destiné à Israël et aussi aux païens, c’est-à-dire à tous les hommes. Comme Isaïe, Jean annonce une venue qu’il s’agit de préparer par une action de conversion : ravins à combler, montagnes à abaisser, passages tortueux à redresser, chemins cahoteux à aplanir (21,4-5). Tous nous sommes appelés à imiter les œuvres de Dieu en effaçant les inégalités comme on aplanit le sol pour une route unie. La parole de Dieu tient pour toujours (Is 40,8). Toujours il faudra que des prophètes se lèvent pour appeler les hommes à la justice et pour annoncer « le salut de Dieu » qui la rétablira. « Tout être vivant verra le salut de Dieu ». Le salut est l’œuvre de Dieu. Il est offert à tous. Saint Luc veut indiquer que Jésus va apporter le salut à tous les hommes.

Source : Roland Meynet, L’Évangile de Luc, éditions Lethielleux, 2005, ISBN 2-283-61239-X.

Roland Meynet est professeur émérite de théologie biblique de l’Université Grégorienne à Rome, auteur de plusieurs ouvrages et e.a. directeur de la revue Gregorianum.

Charlotte LANGEHEGERMANN
 
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